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L'insomnie: Quel cauchemar!

Endormez-vous, qu'ils disaient… Mais si Morphée refuse de nous ouvrir les bras? Peut-on rêver de nuits meilleures?

Modifié le :
2009-01-27 13:23
Publié le :
2008-11-23 20:07
Par:
Marie-Claude Fortin

Plus d’un type d’insomnie

L'homme de ma vie est couché depuis cinq minutes et, déjà, il dort paisiblement (soupir d'exaspération, ici). La vie est trop injuste. Je suis jalouse, et la jalousie attise mon insomnie. Cercle vicieux, quand tu nous tiens...

Il y a une heure et demie, je m'allongeais, épuisée par ma journée de travail et convaincue que je dormirais comme un loir sitôt la tête sur l'oreiller. Mais après une demi-heure d'attente, la valse des positions a commencé. Tourne sur le côté droit. Rotation sur le ventre. Repositionnement des oreillers. Tourne sur le côté gauche. Détortillage des draps. Et ça recommence. En dernier recours, il y a toujours la position du cadavre, comme on l'appelle dans les cours de yoga. Et la litanie qui vient avec: je détends mes orteils... mes pieds... mes chevilles... (Zut! ai-je laissé mon ordinateur allumé? Angoisse.) Je détends mes mollets, mes genoux, mes cuisses... (J'ai chaud. J'ai CHAUD! Qui a fermé la fenêtre?)

Ne plus penser, voilà la solution. Méditer. N'être rien du tout. Néant. Éther. Poussière dans l'univers (perspective angoissante). Et c'est reparti!

Comme le soleil couchant qui projette des ombres démesurées sur les murs, l'insomnie grossit, étire, déforme la moindre de nos pensées. LES insomnies, devrais-je plutôt écrire, car il n'y a pas une seule forme d'insomnie. Ses variantes commencent à nous affecter surtout à la quarantaine. Et ce, pour bien des années à venir.

Moi, je souffre d'insomnie initiale: la durée d'endormissement (passage de l'état de veille à celui de sommeil) est supérieure à 30 minutes (tu parles!). Il y a aussi l'insomnie de maintien: la durée des moments d'éveil la nuit excède 30 minutes. Et l'insomnie du matin: éveil aux aurores, incapacité à se rendormir sauf, bien sûr, quatre secondes avant que le réveille-matin ne se manifeste. Mais que se passe-t-il exactement quand on est épuisées et que le sommeil refuse obstinément de venir nous alléger de notre fatigue?

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Stress et ménopause: un duo de choc

Selon la D re Célyne Bastien, professeure à l'École de psychologie de l'Université Laval et chercheure au Centre d'étude des troubles du sommeil de l'Université Laval Robert-Giffard, le stress est la principale cause d'insomnie. «Une étude réalisée auprès de plus de 1000 personnes ayant rapporté des difficultés à dormir nous révèle que le stress - problèmes à la maison, conflits au travail, perte d'un être aimé, déménagement, etc. - est le facteur précipitant le plus souvent mis en cause. Et ce, même chez les femmes de 40 ans et plus», précise-t-elle.

«À partir de cet âge, chez l'homme comme chez la femme, le sommeil se fragilise», explique la D re Julie Carrier, professeure au Département de psychologie de l'Université de Montréal et chercheure au Centre d'études du sommeil de l'Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. La durée du sommeil lent profond (le stade le plus intense du sommeil) diminue. On devient plus fragiles, plus sensibles au stress, au bruit, au décalage horaire, aux excitants.

Chez les femmes, en plus de ces changements liés au vieillissement, s'ajoutent des problèmes occasionnés par les symptômes de la ménopause et de la périménopause. «Il existe très peu d'études sur les relations entre la ménopause et l'insomnie, constate Julie Carrier. Mais on sait que les troubles de sommeil constituent le deuxième problème soulevé par les femmes ménopausées, juste après les bouffées de chaleur.» Lesquelles sont, elles aussi, des empêcheurs de dormir en rond. Curieusement, ce ne sont pas ces sensations soudaines d'inconfort qui réveillent les femmes. «Le cerveau donne le signal initial. On se réveille, puis survient la bouffée de chaleur», confirme-t-elle.

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L’insomnie et ses dérivés

Nous - les femmes de 40 ans et plus périménopausées ou ménopausées - avons donc nos propres problèmes de sommeil. Mais puisque nous sommes les égales des hommes, nous partageons avec eux tout un chapelet de problèmes ennuyeux associés au dodo.

  • L'apnée du sommeil Non, ce n'est pas l'apanage des ronfleurs masculins (soit dit en passant, les femmes ronflent autant que les hommes, selon Célyne Bastien). Nous souffrons aussi de ce mal étrange. Et le problème augmente à la ménopause. Serait-ce la faute des hormones? «On l'ignore, répond Julie Carrier. Beaucoup de femmes prennent du poids à la ménopause. L'apnée est-elle due à ce gain de kilos? Aux tissus graisseux qui bloqueraient la respiration?» Quoi qu'il en soit, l'apnée - qui provoque des pauses respiratoires durant le sommeil et occasionne des microréveils dont le dormeur n'a souvent pas conscience - diminue la qualité du sommeil et, par le fait même, hypothèque nos performances diurnes. «On croit aussi que l'apnée peut être liée à la dépression, ajoute Célyne Bastien, à la baisse de la libido, aux problèmes cardiaques - tachycardie, infarctus, etc.» Vous vous sentez dépressive, vous avez l'impression de manquer d'énergie? Vous vous réveillez la bouche sèche et la tête douloureuse? Peut-être souffrez-vous d'apnée du sommeil.
  • Le syndrome des jambes agitées Avant de s'endormir, certaines personnes ont l'impression d'avoir des fourmis dans les jambes et ressentent le besoin impérieux de les bouger. Souvent héréditaire, ce problème d'origine neurologique - aussi appellé «syndrome des jambes sans repos» - qui provoque des difficultés d'endormissement peut être traité avec certains médicaments, dont les benzodiazépines. «Il pourrait aussi être causé par une déficience en vitamine E, dit Célyne Bastien. On recommande de la chaleur, mais pas de couverture trop épaisse afin de ne pas exercer un poids sur les jambes. On suggère également de faire de l'exercice modéré durant le jour.»
  • La myoclonie nocturne Les personnes qui souffrent de ce mal donnent des coups de pied ou de bras périodiquement et régulièrement, parfois aussi souvent que toutes les 20 ou 30 secondes. «La personne affectée n'en a pas conscience, précise Célyne Bastien. C'est son conjoint qui en souffre!» Comme le syndrome des jambes agitées, la myoclonie nocturne est d'origine neurologique et peut être traitée par des médicaments. Mauvaise nouvelle: les femmes en seraient plus souvent atteintes que les hommes.

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Ce n’est pas moi, c’est lui!

Qui est capable de dormir pendant qu'un vrombissement de hors-bord lui vrille les tympans? Certainement pas moi. Aux victimes des ronfleurs extrêmes, on suggère les bouchons d'oreilles. Il y en a de toutes les couleurs, de toutes les formes et pour tous les gouts: en caoutchouc, en mousse synthétique ou en cire (mes préférés). Un peu de bruit blanc - un ventilateur, une radio syntonisée entre deux fréquences - peut aussi aider à couvrir les gros ronrons. Si ce n'est pas suffisant, vous pouvez toujours faire chambre à part. Pas de panique! Ce n'est pas parce que vous ne dormez pas ensemble que... vous savez...

L'étendue des dommages

Vous croyez que le manque de sommeil est un problème mineur? Détrompez-vous. Les plus récentes statistiques canadiennes (2006) indiquent que la fatigue est un facteur déterminant dans 19 % des accidents mortels et dans 23 % de l'ensemble des accidents de la route (blessures mortelles, graves ou légères). En effet, pourquoi pensez-vous qu'autant de tragédies surviennent vers 4 h du matin, à un moment où si peu de voitures circulent?

Sur le plan psychologique, on sait déjà que la privation de sommeil entraine des difficultés de concentration et de la mauvaise humeur. Mais l'impact sur la santé serait encore beaucoup plus important qu'on ne le croit. «Si le sujet est peu documenté, note Julie Carrier, cette problématique suscite de plus en plus d'intérêt de la part des chercheurs. Et les dernières études nous révèlent des répercussions profondes sur presque toutes les variables physiologiques: le système immunitaire, la régulation du glucose, le métabolisme, etc. Le manque de sommeil pourrait causer une diminution des anticorps, provoquer le diabète de type 2 ou être à l'origine de certaines formes d'obésité. Les recherches en sont encore à leurs débuts, mais chose certaine, quand on ne dort pas, ça ne va pas bien!»

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La fin et les moyens!

S'il n'y a pas de remède miracle pour améliorer la qualité du sommeil, il y a plusieurs façons de nous aider à mieux dormir. En voici quelques-unes.

  • Les soucis hors de la chambre à coucher Aux stressées et aux anxieuses, on recommande de réserver un moment de la journée, idéalement avant le souper, pour passer en revue leurs problèmes et essayer de trouver des solutions. «C'est un excellent moyen de diminuer l'anxiété, assure Célyne Bastien. On peut se réserver 30 ou 45 minutes et, s'il le faut, coucher nos réflexions sur papier. On sort tout. Et quand on a terminé, on n'y pense plus!»
  • Adieu résistance Si vous êtes couchée depuis 15 ou 20 minutes et que vous n'arrivez pas à dormir, levez-vous, sortez de la chambre et faites autre chose. Vous craignez, comme moi, d'empirer la situation? «Persistez, conseille Célyne Bastien. Même si cela signifie que vous devrez vous relever huit ou neuf fois pendant la nuit. Après une ou deux semaines de ce régime, vous verrez un changement. Vous instaurerez ainsi une restriction de sommeil, une méthode qui crée de la somnolence pendant la journée. Le but, c'est d'associer le lit au sommeil. Alors, si la fatigue vous pousse à faire une sieste au cours de la journée, couchez-vous dans votre lit, pas ailleurs. Et 20 minutes, pas plus!»
  • La régularité, vous connaissez? Un horaire régulier favorise le sommeil. C'est vrai pour les enfants... et pour nous. Couchez-vous toujours vers la même heure. Et instaurez une routine avant d'aller au lit. Par exemple, accordez-vous une bonne heure pour décompresser. Ce n'est pas le moment de faire une petite brassée de lavage! Prenez ce temps d'arrêt pour ne penser qu'à vous et faire ce qui vous plait: écouter les nouvelles, lire un bon roman ou vous prélasser dans un bain plein de mousse à la lueur d'une chandelle.
  • Excitation en exil La caféine nuit au sommeil, c'est la triste réalité. Même votre unique et savoureux espresso allongé du matin aura des effets néfastes sur la nuit à venir. «Ceux qui croient dur comme fer que le café ne les empêche pas de dormir se trompent, dit Julie Carrier. Ils s'endorment peut-être rapidement, mais leur sommeil lent profond est perturbé. Et c'est précisément ce sommeil qui est le plus réparateur.» L'alcool, le thé, le chocolat et même les boissons gazeuses qui contiennent de la caféine sont aussi à proscrire. «L'alcool aide certaines personnes à s'endormir, remarque Célyne Bastien, mais il provoque également de multiples microréveils et il perturbe le sommeil.»
  • À chacune sa fenêtre de sommeil Disons que vous vous couchez tous les soirs à 22 h et que vous vous levez à 6 h. Vous avez la certitude de ne dormir que six heures par nuit même si vous en passez huit au lit. Votre fenêtre de sommeil est donc de six heures. Alors, ne restez pas plus de six heures couchée. En diminuant ainsi le temps passé inutilement au lit, vous serez légèrement en manque, ce qui devrait vous aider à trouver un sommeil plus continu et plus profond la nuit suivante.

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Bien dormir pour mieux vivre

En juin dernier, à la 22 e rencontre de l'Associated Professional Sleep Societies, plus de 7000 spécialistes du sommeil venus de partout dans le monde ont échangé leurs dernières découvertes. Julie Carrier était du nombre. «Quand j'ai commencé ma carrière, dit-elle, nous n'étions que 1500!» Pour la chercheure, c'est la preuve que la science reconnait l'importance du sommeil. «Je suis convaincue qu'un jour on considèrera que bien dormir est aussi important pour la santé que bien manger ou faire de l'activité physique. Et c'est ce que je souhaite profondément.»

En attendant, moi, je ne dors toujours pas. Alors tout doucement, pour ne pas réveiller l'homme de ma vie (qui ronfle paisiblement), je vais me lever, aller dans mon bureau, m'assoir devant mon ordinateur (déjà allumé) et mettre un point final à ce texte. Et pourquoi pas, me faire un café. Décaféiné.

Oyez, oyez!

Le Centre d'étude des troubles du sommeil de l'Université Laval Robert-Giffard est à la recherche d'hommes et de femmes de 25 à 50 ans éprouvant des difficultés de sommeil et ne prenant pas de médicament pour dormir. Vous êtes intéressée à participer aux recherches? Contactez le Centre en composant le 418 663-5000, poste 4791 ou 6835.

Le casque de vos rêves!

Que les insomniaques se réjouissent, il y a (peut-être!) de la lumière au bout du tunnel. Depuis quelques mois, une équipe de chercheurs de l'Université du Wisconsin-Madison travaille à la mise au point d'un casque qui émettrait des ondes magnétiques similaires à celles que produit le cerveau quand nous sommes plongés dans un sommeil profond. Si l'efficacité de cette nouvelle technologie reste à prouver, elle n'en suscite pas moins beaucoup d'espoir...

La version originale de cet article a été publiée dans le numéro de décembre 2008-janvier 2009 du magazine Vita .

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Commentaires

  • vicki's avatar vicki a écrit :

    2009-01-27 3:11 PM

    Quel bon article. Il y a longtemps que je n'ai pas lu d'article aussi bien documenté sur la question. Je vais tester la méthode de restriction... Une insomniaque à ses heures!
  • Coconut's avatar Coconut a écrit :

    2009-03-06 6:09 PM

    J'ai acheté une lampe de luminothérapie l'automne dernier pour contrer les blues de l'hiver. Elle est aussi très utile, tant pour celles dont le sommeil tarde à venir ou encore s'endorment trop tôt. On peut trouver cette lampe chez Jean Coutu pour 200$.
  • suzon's avatar suzon a écrit :

    2009-06-29 10:08 AM

    Les méthodes de relaxation sur Cd Yoga Nidra, narrées par Nicole Bordeleau peuvent agir bénéfiquement sur le sommeil (à condition bien sur de la pratiquer quotidiennement). Je ne peux le confirmer car je commence à l'expérimenter. Chose sure, c'est qu'apres une séance, on en revient presque ressuscitée. Ca compense une mauvaise nuit. Une bonne idée: s'en faire une sur son heure de diner, pour aider à passer l'après-midi. Etant une insomniaque légendaire qui en souffre beaucoup depuis l'age de 20 ans, j'ai essayé toutes les méthoses. La pratique du Gi-Qong est aussi spectaculaire, mais encore là, à force de la pratiquer. On peut être si paresseuse!
  • MANON37 a écrit :

    2009-08-24 11:09 PM

    Je souffre d'insomnie depuis belle lurette. Par contre, depuis un certain temps, dormir 6 heures en 2 jours est devenu une routine. J'arrive plus à compter les moutons "serta", même les chiffres prennent une place démesuré. Présentement, la seule chose qui marche, à temps partiel est une petite "sniff" d'huile essentiel à la lavande. J'ai essayé pas mal de techniques, mais rien n'a réellement marché et à long terme non plus!
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